... Serge est une falaise abrupte pleine de failles

Il descend tous les jours gare St Lazard et passe devant Momo, le petit marchand de fleurs. Depuis qu'un jour, en panique, il s'est arrêté pour en acheter à une belle qu'il a beaucoup aimé, Serge continu de saluer Momo et réciproquement. Même s'il n'achète plus de Fleurs depuis longtemps.
La belle s'est fait la malle. "Tu manques de fantaisie Serge, t'es gentil, t'es bon, mais tu m'ennuies". Tiens, prend toi ça dans les dents. Ça lui a fait mal au début. Il a fini par s'habituer. Il est devenu un peu plus carré. Même si ses yeux ont gardé l'empreinte du doute.
Ça lui a servi de leçon aussi. Il n'a plus trompé sa femme depuis. Peut être bien qu'il s'ennuie un peu avec elle, mais il se dit maintenant que c'est plus de sa faute à lui que de la sienne.
Sa femme s'appelle Lolita, mais elle préfère qu'on l'appelle Loli, à cause du film et tout ça. Elle dit qu'à cinquante berge, s'appeler Lolita c'est ridicule.

Serge est dans le métro, sur la ligne 13. Il pense à sa femme et à sa fille. Il se dit qu'il ne sait pas aimer et que c'est pour ça qu'on ne l'aime pas. Tout au moins on le supporte. Ce n'est pas qu'il n'éprouve pas de sentiments, loin de là, trop même peut être. C'est le bordel tellement il y en a, il ne sait pas quoi faire avec. Serge est démuni face aux sentiments, alors il fait comme si ils n'existaient pas. Même si ses yeux en garde la trace.

Assis à côté de lui, il y a une jeune fille, très jolie, très élégante, à peine plus vieille que sa fille. Elle a un petit air triste, ou peut être seulement fatigué. Serge se dit que les gens dans le métro, le soir, ils ont toujours l'air triste.
Station St Lazare, ça y est, il est temps de descendre. La jeune fille se lève aussi. Serge s'arrêterait bien chez Momo pour offrir des Fleurs à la jeune fille au regard triste, juste pour voir comment ça fait quand elle sourit. Mais il hausse les épaules. Elle le prendrait pour un vieux pervers, alors il se contente de saluer Momo comme tous les soirs...