Ce matin j'ai fait quelque chose que je n'avais pas fait depuis longtemps. Je suis allée pleurer un bon coup au bord de la Loire.

Pourquoi ce matin ?

ça remonte à vendredi, l'émotion qui remonte par le corps. Depuis je la sens qui traine en moi. Ce matin j'avais rendez-vous avec ma psy, j'ai pas mal pleuré pendant la séance. C'est le seul espace ou je me l'autorise vraiment. Parce qu'il y a deux "moi" en ce moment. Celle qui souffre et qui a peur et celle qui dit :"c'est bon maintenant ! avance!" Alors j'avance. Je bouscule ma vie. Je prend un chien par exemple. Je tente de nouvelles expériences. Je m'implique, je m'engage, je m'ouvre à l'extérieur. Je me fais un peu violence parfois, d'autres fois je m'y précipite comme un grand besoin d'air.

C'est toujours par le corps que celle qui souffre arrive. Le corps, cet outil de la vie, j'ai tellement peur qu'il me lâche. J'ai tellement peur de mourir, pas tant de perdre la vie que d'abandonner la merveille, que de la trahir d'une certaine façon. Je porte encore en moi ce qu'elle m'a dit un jour: "maman, je voudrais que tu vives longtemps, je voudrais que mes enfants te connaissent". Elle avait cinq ans, quand elle m'a dit ça. Je ne lui ai pas promis de vivre mais je lui ai promis de faire de mon mieux, de prendre soin de moi le mieux possible.

Mais, depuis la mort de François, mon corps s'exprime par de multiples petits bobos successifs. Chaque fois, ça réveille ma peur de mourir. Chaque fois, j'en passe par l'effondrement avant de remonter la pente. Face à mes peurs j'ai toujours fait appel à ma réflexion et à ma compréhension pour me rassurer. Et quand j'y parviens, c'est efficace. La peur se dissout quand je comprend ce qui se joue. Mais je ne parle pas le langage de mon corps. Ou alors, les réponses ne lui suffisent pas. Le stress est la réponse des médecins le plus souvent. ça me ferait rire si ça ne me mettait pas en colère. Ce n'est pas une réponse suffisante. J'aimerai, au fond, qu'une porte s'ouvre, qu'un nouvel éclairage apparaisse, une clé qui me permettrait de comprendre et de désamorcer. Mais si ce chemin là est celui de mon esprit, il n'est pas celui de mon corps. Peut-être que je veux trop le maitriser. Peut être que je devrai accepter de le laisser bosser sans moi, après tout, les symptômes que j'éprouve ne sont pas grave, juste chiant, et encore, ils sont chiants parce que je leur laisse prendre beaucoup de place. Difficile de trouver l'équilibre entre je ne l'écoute pas et je l'écoute trop. L'écouter, prendre soin, mais se souvenir que ce n'est pas grave. Peut être qu'il a besoin de tout ces symptômes pour se soigner, peut être que c'est juste le signe qu'il fait son boulot. Après tout la cicatrisation, ça démange... Tiens c'est drôle, c'est justement ça mon dernier symptôme, démangeaison du visage, particulièrement autour des yeux... Tout va bien... Tout va bien...