IMG_5797.jpg, août 2022

Bon. La chirurgienne m’a appelée tout à l’heure, à la sortie de sa réunion d’équipe.
Les nouvelles, elle commence toujours par la bonne. Le pet scan n’a pas révélé de métastases.

La mauvaise nouvelle, la deuxième biopsie a confirmé la présence d’un deuxième bidule mais d’un type différent. J’ai donc deux cancers dans le même sein gauche. Le premier, de type HER-2 triple négatif, stade 1, le deuxième, type hormonale, 6mm.

Elle me dit que ses collègues oncologues et radiologues sont pour la solution radicale. C’est quoi la solution radicale que je demande. L’ablation totale du sein…

- C’est-à-dire que là, mardi, je me ferais enlever tout le sein ?
- C’est une possibilité
- Il y en a d’autres ?
- On peut aussi traiter chaque cancer de manière indépendante. Pour le premier HER-2, on enlève la tumeur, on voit si tout est clair autour, on analyse les ganglions et on avise selon si chimio, si radiothérapie. Pour le deuxième, on enlève la tumeur, on regarde si tout est clair, radiothérapie, hormonothérapie et pour les deux surveillances accrue. Ou encore, on fait comme on a prévu, l’opération le 9 aout et selon les résultats d’analyses on avise si c’est pertinent à ce moment là de faire l’ablation totale du sein.

A partir de là mon esprit se brouille. J’ai un choix à faire mais les avantages et les inconvénients de l’un ou de l’autre ne sont pas clair. J’entends que les oncologues prônent la mastectomie, mais pour quelle raison ? Elle me dit que ça ne limite pas tant que ça le risque de récidive. Alors quoi ? ça évite la radiothérapie. Ça évite une deuxième opération plus tard si nécessaire, et c’est tout ? J’ai l’impression qu’on me demande de faire un choix mais que je n’ai pas tous les éléments pour pouvoir décider. Je pense qu’elle m’a tout dit, mais c’est moi qui n’’arrivai plus à écouter. Je crois que j’ai perdu la moitié des infos. On a convenu de se rappeler demain pour que je puisse réfléchir avant de prendre une décision. Là, maintenant, je suis tentée de choisir la dernière. L’opération prévue, j’y suis préparée, ça me laisse trois semaines pour envisager d’y laisser mon sein gauche, j’avais de toute façon ces trois semaines d’incertitudes pour le premier cancer, chimio ? pas chimio ? quelle molécule ? Ça rajoute en plus mastectomie ? Pas mastectomie ?

L’été sera passé, ce sera la rentrée, nouvelle période, nouvelle… aventure.

Le plus difficile, c’est cette somme d’incertitudes.

Je suis allée avec l’amoureux faire un tour au bord de l’océan. Tout était dans la brume, comme mon esprit. Je me suis mise derrière un rocher et j’ai crié face à l’océan. Après deux/trois cris, les sanglots sont venus. J’ai pleuré comme une petite fille dans les bras de mon homme. Fallait que ça sorte. Et puis j’ai respiré. Et maintenant je suis fatiguée.

Cette maladie réserve toujours des surprises et des rebondissements, je le savais, mais celui-là, je ne l’avais pas imaginé, deux cancers du sein de types différents… Je me demande si c’est fréquent… En même temps, je me suis bien gardée d’imaginer quoi que ce soit, j’ai bien fait, ça ne m’aurait pas aidé de toute façon.

Y laisser un sein… Le premier mot qui m’est venu c’est « mutilation ». Et puis je me suis dit : « Non, je ne vais pas penser les choses comme cela, ce n’est pas possible. Comment je vais expliquer à mon corps qu’il va peut-être falloir se séparer d’une partie de lui ? » J’ai pensé rituel, deuil. Et puis j’ai pensé aussi, après, plus tard : « N’oublie pas la bonne nouvelle. C’est toujours guérissable».